Le vieil homme et l’enfant

Il a 90, 91 ou 92 ans, le vieil homme est là, face à la classe. Il est venu parler aux enfants. Il y a pourtant 3 générations d’écart entre le vieil homme et l’enfant. Que fait-il là, debout sur ses jambes hésitantes, montrant au rétroprojecteur des cartes et des documents ? 
Il est venu parler de son engagement pour la liberté mais aussi pour dire l’indicible, raconter sa jeunesse volée, les coups et les camarades assassinés par la barbarie. Il est venu pour témoigner, pour dire les humiliations, les soupes trop claires et les 30 kilos perdus. Les appels sans fin dans le froid et la neige, les marches forcées, les efforts surhumains pour aider son ami épuisé qui finira pourtant avec une balle dans la tête… 
Pendant plus de deux heures, l’enfant écoute. Il appréhende et comprend la réalité de la guerre et des camps de concentration. Il ne perd pas une miette, ni lorsque la gravité l’étreint, ni lorsqu’il s’amuse d’une anecdote plus légère.
Incidemment, l’enfant comprend qu’il n’assiste pas à un simple récit vécu, une illustration vivante d’un cours d’histoire. Il voit les efforts du vieil homme, il entend la solennité, les sanglots et la douleur du témoin qui « retourne dans la nuit » à chaque séance scolaire. L’enfant observe avec bienveillance les cheveux blancs et les mains anoblies par le temps de ce grand-père universel, dont le témoignage vaut toutes les leçons.
Ces 9 images ont été exposées à la Base sous-marine de Bordeaux. Voir onglet Expositions.